voir graine de connaissance : https://bra.in/9pxeL6
Copie d’une enquète : DOSSIER – S.O.S. CHEF RAONI EN DANGER : LES DESSOUS D’UNE TOURNÉE SCANDALEUSE (1/2)
Enquète publiée le 18 mai 2019 sur le site Planète Amazone par Gert Bruch. Nous republions l’article qui n’est plus disponible sur le site d’origine. Notre motivation est de contribuer à construire une conscience ouverte sur l’écosystème des ONG qui agissent pour la sauvegarde de l’Amazonie et plus généralement autours de la question des peuples racines afin de permettre une meilleure connaissance au service d’actions en connexion avec les intentions profondes. Nous effectuons cette démarche dans le cadre de la création de graines de connaissance autour du #OFF que nous faisons autours de l’évènement “Forum des peuples racines” et dans le prolongement de l’article “Le Temps de l’Amour”. (source 1 et source 2)
Comment le vieil ami controversé du célèbre chef amazonien Raoni Metuktire, organisateur de sa nouvelle tournée européenne, abuse de sa vulnérabilité et de sa confiance et quels sont les dessous de l’Institut Xingu, projet pharaonique à 15 millions € maintes fois recyclé depuis près de 20 ans
Message urgent du cacique Megaron à propos de l’actuelle tournée en Europe
de son oncle, le cacique Raoni
Je suis très préoccupé par le voyage de mon oncle Raoni à travers les pays d’Europe. Sa première campagne avec Sting fut pour délimiter la terre indigène Mekragnoti et le gouvernement brésilien était au courant de la campagne et la FUNAI l’était également.
Ce voyage organisé par Jean Pierre [Dutilleux] est seulement pour lui-même, il ne nous a pas présenté le projet de cette campagne. Ce n’est que récemment que nous avons appris la création de l’Institut Xingu et quelles ressources seraient collectées dans le cadre de la campagne pour l’Institut Xingu. Nous nous inquiétons pour l’image et le nom du cacique Raoni. Il a plus de 80 ans et nous, ses neveux, sommes inquiets pour lui. Son petit-fils Beptuk est très inquiet pour son grand-père.
Voici mon message à Jean Pierre [Dutilleux]:
« Jean Pierre, tu n’as pas présenté chez nous la proposition de créer l’Institut Xingu, tu n’as pas expliqué quelle ressource collectée lors de la campagne irait à l’Institut Xingu et quelle ressource serait utilisée pour planter en bordure du parc indigène du Xingu. La plupart des dirigeants autochtones ne le savaient pas. Jean Pierre, les paroles du chef Raoni ne sont pas en train d’être correctement traduites. Nous voulons que tu envoies un billet d’avion pour un traducteur, soit Bepo Metuktire ou soit Patxon Metuktire. Le chef Raoni a parlé de la terre Kapot-Nhinore, ce qui n’a pas été traduit dans les médias, pour le public européen.
Le public doit savoir de quoi parle le chef Raoni, ce qu’il veut transmettre et ce qu’il attend des citoyens européens, quel soutien il demande aux citoyens européens. Jean-Pierre, envoie-moi un billet d’avion pour que je puisse aider mon oncle Raoni. »
En 1989, le chef Raoni et Sting voyagent autour du monde pour lever les fonds nécessaire à la démarcation d’une immense terre indigène permettant de faire la jonction avec d’autres terres déjà protégées. L’idée de cette tournée vient du cinéaste Jean-Pierre Dutilleux, qui a rencontré le cacique Raoni en 1973 et traîne déjà en cette fin des années 1980 une réputation sulfureuse de profiteur, à tel point que Sting et la Rainforest Foundation s’en séparent rapidement (Dutilleux conservera l’antenne française de la Fondation, l’Association Forêt Vierge, détachée de la maison mère depuis 1990). La Rainforest Foundation effectuera de nouvelles collectes de fonds grâce à Sting et démarquera la terre Mekragnotire en 1994. Sans doute lassé par les scandales causés par Dutilleux autour du nom de Raoni, Sting et la Rainforest Foundation décident de stopper leur collaboration avec les Kayapo, une fois leur promesse tenue. Le chanteur gardera toutefois une affection sincère pour le chef indigène.
2000 -2001: Chirac rejette le projet pharaonique « Institut Raoni » version Dutilleux
En 2000, le cacique Raoni revient en France par l’entremise de Jean-Pierre Dutilleux et son Association pour la Forêt Vierge (AFV). Sans ambition et sans projet, l’AFV avait été mise en veille au début des années 1990, jusqu’à ce que Jean-Pierre Dutilleux ait une idée : établir une structure permanente pharaonique dans l’un des territoires nouvellement démarqués du Xingu, avec notamment une école, un dispensaire, un centre de télécommunications, et surtout un centre d’hébergement pour touristes fortunés. Le cacique Raoni est reçu par le président Jacques Chirac, puis passe à la télévision aux côtés de Dutilleux. Ce dernier appelle aux dons de la part du public, mais cherche surtout à obtenir les fonds nécessaires auprès de l’Etat français et d’autres pays européens (notamment la Suisse et la Belgique).
L’année suivante, le GRET (Groupe de Recherche et d’Echange Technologique), missionné par la présidence de la république, remet son rapport sur la faisabilité du projet. Bien que Jean-Pierre Dutilleux ait imposé sa présence dans l’équipe d’experts financée par des fonds publics, le rapport de l’étude de faisabilité de l’Institut Raoni recommande d’en diminuer considérablement les ambitions initiales, appuyant notamment le fait que l’établissement de constructions permettant un mode de vie à l’occidentale au milieu de la forêt ne seraient pas viables à cause des coûts d’approvisionnement par hélicoptère. L’Etat français refuse ainsi de cautionner le projet de Jean-Pierre Dutilleux, et fait une contre-proposition quinze fois moins onéreuse, basée sur le développement de l’agriculture locale et la surveillance des territoires démarqués. Le rapport est remis au cacique Raoni en main propres en 2001 par Jacques Chirac devant les journalistes.
2002, le cacique Raoni : « je vais tuer Jean-Pierre ! »
La création de « l’Instituto Raoni« , interviendra quelques mois plus tard, toujours en 2001. Jean-Pierre Dutilleux ne sera pas lié à la création de l’organisation qui est aujourd’hui toujours dirigée par le grand chef amazonien. Ce sont des partenaires néerlandais des Kayapo qui en poseront les bases, opérationnelles et administratives. Que s’est-il passé ? Dutilleux se défend d’avoir trouvé les fonds nécessaires à la réalisation du projet qu’il portait pour le cacique Raoni, arguant que tous ses soutiens potentiels se seraient désistés suite aux attentats du 11 septembre 2001. Toujours est-il que le cacique Raoni, très fâché, dépose plainte contre lui au Brésil dès 2003 afin que tous les fonds ayant été collectés par Dutilleux en son nom soient directement transmis au peuple kayapo.
En fait, Dutilleux voyant son projet pharaonique retoqué, a tenté de le recycler chez un autre peuple de la région du Xingu, le renommant au passage « Instituto Xingu« . Très en colère, le cacique Raoni déclare alors à son ami Aritana, le chef du peuple Yawalapiti, « Je vais tuer Jean-Pierre ! ». Commence alors une nouvelle traversée du désert pour Dutilleux, qui ne reverra plus le cacique Raoni pendant 7 ans.
2010, Dutilleux réclame des fonds pour créer un Institut Raoni qui existe déjà depuis 9 ans !
D’autres auraient fait profil bas, mais Dutilleux ne renonce jamais. Il veut relancer le projet, qu’il appelle abusivement « le vieux rêve de Raoni ». En 2009, profitant des difficultés financières de l’Instituto Raoni au Brésil, il parvient à renouer avec le cacique Raoni et à convaincre les Kayapo de repartir en campagne en Europe avec le vieux chef. Au même moment Sting, également appelé au secours par les Kayapo, est sur le point de faire son grand retour auprès du chef. Il fait même une conférence de presse à ses côtés, 3 semaines après le retour de Dutilleux, contre le barrage de Belo Monte. Mais le cacique Raoni ayant accepté de suivre Dutilleux en Europe, Sting se retire.
Le cacique Raoni arrive une nouvelle fois en France en 2010. Son but est de lutter contre le barrage de Belo Monte et aussi de renforcer son organisation au Brésil en trouvant des fonds pour y développer de nouveaux projets ou renforcer ceux qui sont en cours. Stupéfaction lorsque Dutilleux parle à nouveau au cours de cette tournée de « créer un Institut Raoni », tandis que le cacique Raoni ne reçoit pas de traduction correcte de ses propos. Pour qui parle portugais dans l’assistance des rencontres publiques, la confusion est totale. L’Instituto Raoni existe bien, il est financé par des ONGs étrangères, et mène avec difficulté les actions nécessaires de surveillance du territoire, de développement de l’économie locale, mais aussi de plaidoyer auprès des pouvoirs publics brésiliens pour faire valoir les droits des peuples indigènes (Conservation International, EDF – Environmental Defense Fund…), devenus encore plus compliqués à faire respecter avec le développement massif de l’agro-industrie.
Mais évidemment, ce n’est pas le grand public qui doit fournir les millions. Dutilleux obtient des accords de principe de la Fondation Chirac et de la fondation du prince Albert II de Monaco, pour l’aider à trouver des bailleurs de fonds. Il demande aux deux organismes de créer un fond dédié à soutenir « la réalisation de l’Institut Raoni ». Pourtant rien ne bouge. Prudence des intéressés ?
2011, Dutilleux appâte le chef et tente de monnayer son silence sur le barrage pour financer son projet pharaonique
Qu’à cela ne tienne ! Dutilleux ramène le cacique Raoni l’année suivante, en septembre 2011, l’appâtant par des promesses de financement pour la démarcation du dernier bout de territoire encore non protégé de son peuple, Kapot-Nhinore, où reposent les corps de ses parents. Des appels au soutien financier fantaisistes sont lancés, la somme de 300 000 euros est avancée à l’emporte pièce. En réalité, Dutilleux sait très bien que l’argent ne résoudra rien, le processus de démarcation, strictement cadré au Brésil et passant par cinq étapes, étant totalement à recommencer. De plus, des fermiers ont envahi le territoire concerné. Il faudra donc passer par de très longues actions judiciaires pour espérer les voir partir. Si Dutilleux berne son monde, c’est qu’il s’est vu promettre un soutien énorme pour son projet pharaonique d’Institut Raoni par un proche d’Henri Proglio, patron de EDF (qui prépare des barrages en Amazonie brésilienne). Dutilleux veut faire coup double : il se tourne à la fois vers le ministère du développement et de la coopération, et vers le milieu des affaires.
A son arrivée à l’aéroport Charles de Gaulle, le cacique Raoni repousse son comité de soutien venu lui remettre les 100 000 premières signatures de sa pétition contre le barrage de Belo Monte et une journaliste qui l’interroge sur le barrage. Après une folle course-poursuite, il fini par accepter de recevoir les registres de sa pétition. Le lendemain, le journal Metro titre « l’étrange silence de Raoni ». Dutilleux semble avoir temporairement convaincu le cacique et l’un de ses accompagnants, Bemoro Metuktire, de suivre son plan. Seulement il y a un problème qu’il n’avait pas prévu : l’opposition au barrage de Belo Monte a énormément grandit en France et dans le monde, suite à la diffusion sur internet, en juin 2011, d’une fameuse photo détournée du cacique Raoni pleurant de façon traditionnelle. Le succès en France de la pétition qui s’ensuit crée un mouvement gênant pour les autorités, car des entreprises à capitaux publics français participent au gigantesque ouvrage brésilien. De fait, le thème Belo Monte devient tabou pendant cette campagne présenté devant les médias comme un « voyage médical », et le cacique Raoni est empêché de s’exprimer sur le barrage par Dutilleux. C’est pourtant sa volonté de rencontrer les signataires de sa pétition et de participer à un rendez-vous à l’ONU de Genève pour dénoncer Belo Monte. Dutilleux fait tout pour empêcher le cacique d’y être présent, mais des militants parviennent à tirer Raoni et ses deux accompagnants de ses griffes. A Genève, les accompagnants du chef déclarent être « retenus en otage » par Dutilleux, depuis le début du voyage. Le ministère s’efface, les entreprises retirent leur soutien. Le projet de Dutilleux tombe une nouvelle fois à l’eau. Il est chassé par le cacique Raoni par voie de communiqué quelques mois plus tard et dénoncé dans un documentaire brésilien.
2016 – 2017 les promoteurs du carbone éloignent le cacique Raoni de Planète Amazone
Depuis 2012, Planète Amazone a porté avec dignité et respect la voix du cacique Raoni dans le monde entier, réalisé 3 tournées européennes pour lui et sa participation à de nombreux événements internationaux, dont la COP21, où a été lancée l’Alliance des Gardiens de Mère Nature. En raison de son grand âge, Planète Amazone décide dès la fin 2015, de ne plus organiser de tournée pour le cacique Raoni. La dernière collaboration remonte à la tenue de la Grande Assemblée de l’Alliance à Brasília, en octobre 2017, où Planète Amazone a rassemblé 200 leaders indigènes et environnementalistes du monde entier autour de sa personne, grâce au soutien de Nicolas Hulot, Pierre Richard, Bernard Lavilliers, Paul Watson et Hugues Aufray. Suite à cela, mécontente de sa gestion et de son incapacité à protéger le cacique Raoni, Planète Amazone annonce à ses donateurs cesser toute collaboration avec l’Institut Raoni mais garder son affection et sa confiance au vieux chef. Parallèlement, l’Alliance dénonçant les crédits carbone et l’Institut Raoni étant financé par certaines institutions les soutenant, le cacique Raoni est fortement incité à s’éloigner de Planète Amazone et de son fondateur, Gert-Peter Bruch, au moment même où Dutilleux manœuvre en coulisses pour préparer son retour. Action, concertée ? Depuis, Planète Amazone est tenue à l’écart du cacique et l’Alliance n’a plus entendu parler de lui. Est-ce une simple coïncidence si l’appui principal du nouveau retour fracassant de Jean-Pierre Dutilleux, l’homme d’affaires Robert Dardanne, est « opérateur de crédit carbone » au Brésil, et aussi en Guyane, ou sa société Voltalia a construit un barrage hydroélectrique ?
2019, Dutilleux écrit l’épitaphe du chef Raoni, 88 ans, avec un livre et une tournée scandaleuse
2019, sept ans et demi plus tard, revoilà donc le cacique Raoni en France auprès de Dutilleux, pour la sixième fois. Que de manipulations et complots régulièrement dénoncés par Planète Amazone depuis 2016, dans l’indifférence, pour finalement parvenir, avec le soutien de l’ambassade de France au Brésil, à organiser ce « dernier voyage » à odeur de scandale. « Raoni, mon dernier voyage », c’est d’ailleurs le titre du nouveau livre de Dutilleux chez Flammarion, pompé à plus des deux tiers sur « Raoni, mémoires d’un chef Indien » (Le Rocher, 2010), dans lequel il mettait régulièrement dans la bouche du chef ses propres souvenirs pour se valoriser. L’éditeur, qui na pas hésité a participer à une très douteuse assignation en référé engagée par Dutilleux en son nom et en celui du cacique Raoni à l’encontre de Planète Amazone pour faire retirer d’internet une vidéo ou Raoni le dénonçait, promotionne l’ouvrage comme « Le testament de Raoni ». Dutilleux a été débouté, une fois que le procureur de la République brésilien Felicio Pontes a pu témoigner que le cacique n’avait pas connaissance de cette action judiciaire et en éprouvait de la tristesse. Ce procureur, qui a mené plus de vingt actions judiciaires contre le barrage de Belo Monte, a également rapporté l’inquiétude du cacique lorsqu’il lui a appris que le cabinet d’avocats avec lequel Dutilleux prétendait le représenter, Simmons & Simmons, défendait les intérêts de NordGold (Montagne d’Or) ou encore EDF.
Le cacique Raoni, analphabète et vivant au fin fond de l’Amazonie privé d’une assistance juridique permanente et de conseillers à la hauteur des enjeux, a désormais environ 88 ans. Ce sont les propres récentes manipulations graves de Dutilleux à son encontre, avec la complicité du représentant Kayapo Bemoro Metuktire rêvant de lui succéder, qui ont révélé sa vulnérabilité, celle d’un homme affaibli. Dans une vidéo datée de février 2017, le petit fils du cacique, Patxon Metuktire, directeur de la FUNAI de Colider, a dénoncé Dutilleux pour « crime d’abus de faiblesse ».
Sauvetage fantaisiste de la « grande réserve du Xingu » avec des murs de bambous et la Fondation Yves Rocher
Cette tournée, pompeusement dénommée « Amazon Rainforest Europe Tour », utilise les ressorts habituels de Dutilleux. De nouveau, Raoni, toujours aussi mal conseillé et protégé par son Institut, a été appâté par une promesse de lever des fonds pour démarquer la terre de Kapot-Nhinore. Dutilleux lui avait promis qu’il voyagerait avec 3 kayapos, dont son bras droit et neveu Megaron Txucarramãe et son petit-fils Patxon, traducteur officiel et assistant juridique. Dutilleux les a écarté tous les deux à la dernière minute, les remplaçant par des jeunes d’autres peuples, inexpérimentés aux voyages internationaux et donc malléables. Au final, l’Association Forêt Vierge demande 1 million € non pas pour le territoire de Kapot-Nhinore mais pour le but très vague de « sauver la grande réserve du Xingu ». On apprend dans la presse, soi-disant de la bouche du chef Raoni lui-même (les traductions douteuses sont une récurrence des voyages organisés par Dutilleux), qu’il s’agirait de restaurer les limites des territoires indigènes de la région, recouvertes en partie par de la végétation sauvage, avec « des murs végétaux à base de bambou » ! Cette proposition farfelue, inspirée parait-il par Jacques Rocher (président d’honneur de la Fondation Yves Rocher, qui reçoit le cacique Raoni pour une conférence le 30 mai à la Gacilly) ne peut en aucun cas être considérée comme une démarcation légale de terre indigène au Brésil, en l’état actuel de la législation. La démarcation consiste à défricher tout au long d’un territoire indigène une allée continue de 6 mètres de large, parcourue de bornes avec panneaux, rappelant les textes de loi qui punissent tout éventuel intrus, point à la ligne !
Quant à la prétendue « grande réserve du Xingu » dont parle Dutilleux elle n’a aucune reconnaissance légale et n’existe pas en tant que telle. S’il parle du Parc Indigène du Xingu, le cacique Raoni et son peuple n’y résident pas. S’il veut parler des 7 territoires indigènes distincts (Bau, Kayapo, Menkragnoti, Parana, Capoto/Jarina, Wawi, et le parc Indigène du Xingu) collés les uns aux autres à cheval sur les Etats du Mato Grosso et du Para, il a l’obligation de consulter et d’obtenir l’accord des 16 peuples qui les composent et du gouvernement brésilien, ce qu’il n’a évidemment pas fait avant de rendre public ce projet, en bon néocolonialiste qui se respecte. En omettant de le faire, Dutilleux et Forêt Vierge violent la Convention 169 de l’OIT, ratifiée par le Brésil, qui garantit aux peuples autochtones une consultation préalable, libre et éclairée.
1 million € pour Raoni, et 15 millions € pour sortir les Indiens du jardin zoologique
Mais plus grave, derrière l’appât douteux, Dutilleux revient à la charge et cherche à lever 15 millions d’euros, c’est à dire 15 fois plus que ce qu’il promet à Raoni et à ceux qui les accompagnent, pour son sempiternel projet pharaonique, qu’il nomme de nouveau « Institut Xingu ». Dutilleux a une nouvelle fois changé sa formule de financement et ses partenaires, mais l’idée est toujours la même. Les ramifications de son réseau vont cette fois-ci jusqu’aux autorités françaises en passant par un promoteur des barrages hydroélectriques et des crédits carbones, des clubs de dirigeants d’entreprises en Suisse et au Luxembourg, la fondation Yves Rocher, et toujours la principauté de Monaco.
C’est par la séduction que Dutilleux guidera, comme toujours, le cacique Raoni vers ces divers interlocuteurs, sans garde fou, sans protection juridique appropriée et sans traduction correcte. Il pourra compter sur le soutien aveugle des fidèles, Patrick Mahé, ancien directeur de Paris Match proche de Jean-Marie Le Pen, Henri de Bontin, conseiller en fortune soutient de Nicolas Dupont-Aignan (qu’il rêve de présenter au cacique) dont le frère est un proche du Prince Albert II de Monaco et dont la soeur a déposé sans l’accord de l’intéressé la marque « Raoni » à l’INPI au profit de l’AFV, Nathalie Gaillard, galeriste et présidente de l’AFV, Alexandre Bouchet, producteur et réalisateur chez Yemaya (qui filme tous les faits et gestes du chef Raoni pendant son voyage pour un projet de télévision) ou encore le producteur Chris Breakman.
Et, de façon tragique, Dutilleux peut compter sur le très ambitieux Bemoro Metuktire, 43 ans, représentant kayapo qui rêve depuis des années de prendre la place du cacique Raoni et n’hésite pas à manipuler sans vergogne le chef le plus respecté de son propre peuple. C’est d’ailleurs le seul accompagnant kayapo de Raoni dans ce voyage, alors que Dutilleux lui en avait garantit trois, notamment pour que le chef très âgé puisse bénéficier d’une traduction correcte et d’une protection juridique. Selon deux témoins, et pas des moindres, les kayapos n’ont appris qu’à la dernière minute que Dutilleux n’autorisait finalement que Bemoro Metuktire à accompagner Raoni dans ce voyage et qu’il ferait campagne pour un « Institut Xingu » et non pour leur Institut Raoni. Ils ont alors tout fait pour dissuader le chef de prendre l’avion mais Bemoro avait bien ferré l’appât pour Dutilleux et le cacique, dans l’espoir de ramener quelque bénéfice pour son peuple, est parti quand même, contre l’avis de tous.
Depuis, Bemoro contribue à faire barrage entre le cacique Raoni et toute personne pouvant menacer ses projets. Les proches du cacique qu’il n’informe pas suivent la tournée sur internet. Les trois leaders du peuple Munduruku venus lutter contre les grands barrages (à l’occasion du Congrès International de l’Hydroélectricité), présents à Paris aux mêmes dates que le cacique Raoni, n’ont jamais reçu de retour à l’invitation à les rejoindre qu’ils lui avaient transmise par l’intermédiaire de Bemoro. Quand ils sont tombés sur lui par hasard devant la tour Eiffel, celui-ci a pris la fuite. Megaron Txucarramãe, neveu de Raoni, longtemps désigné comme son successeur, disait bien vrai lorsqu’il expliquait dans une vidéo de dénonciation que Dutilleux avait la dangereuse faculté de créer des conflits entre indigènes. Et il le fait au moment où une union sacrée est nécessaire pour faire face à la menace Bolsonaro.
L’opération actuelle aura le mérite, s’il elle réussit, de blanchir l’image du sulfureux Jean-Pierre Dutilleux, pourtant maintes fois dénoncé par le cacique Raoni et son peuple et par bien d’autres, dont nous même, qui avons eu à subir ses manipulations depuis le début de l’existence de Planète Amazone. Si cette entreprise échoue, l’image du cacique Raoni aura été durablement souillée, ce qui ne manquera pas de jeter un discrédit sur la cause tout entière. Jair Bolsonaro et tous les fossoyeurs de l’Amazonie s’en frottent déjà les mains. Dans une image d’archive que nous détenons, Dutilleux affirme que nous ne pouvons pas laisser les Indiens comme des animaux dans un jardin zoologique, ça ne vous rappelle rien ? Au moment où nous écrivons ces lignes, il promène le cacique Raoni devant les médias dans le parc animalier belge de Pairi Daiza. Ironie, quand tu nous tiens.
L’Association Forêt Vierge de Jean-Pierre Dutilleux avait été écartée par le chef Raoni début 2012 pour l’avoir empêché de s’exprimer contre le barrage de Belo Monte, découvrez comment elle a réussi à organiser en mai 2019 sa tournée en France et dans les paradis fiscaux européens avec le soutien d’un industriel des barrages cité dans le procès de l’arnaque au CO2 et d’un cabinet d’avocats protégeant les intérêts de multinationales, grâce aux agissements illégaux d’un proche de Nicolas Dupont Aignan, le baron Henri de Gislain de Bontin, actuel vice-président de l’AFV.
Le 18 mai 2019, Planète Amazone, assumant son rôle de lanceur d’alerte, publiait le dossier « S.O.S Chef Raoni en danger : les dessous d’une tournée scandaleuse « , se focalisant principalement sur le projet d’Institut Xingu à hauteur de 15 millions € du très controversé Jean-Pierre Dutilleux, cinéaste, écrivain, homme de réseaux belge, et surtout architecte principal de la tournée européenne 2019 du chef amazonien passée par la France, la Suisse, le Luxembourg, la Belgique, Monaco et le Vatican. Ce second volet fait sortir de l’ombre un autre personnage haut en couleurs, le baron Henri de Gislain de Bontin, conseiller financier ayant fait carrière dans les assurances, bras droit de Dutilleux depuis 2010 et vice-président de son Association Forêt Vierge (AFV).
Chef Raoni : de Dupont Aignan aux affairistes conviés par un « ami » industriel des barrages, les mauvaises rencontres de Forêt Vierge
A la mi-mai 2019, alors que le chef Raoni est attendu à Paris par trois leaders du peuple Munduruku dont leur chef suprême et une coalition internationale d’opposants au grands barrages réunis dans un événement parallèle au Congrès International de l’Hydroélectricité et une action de protestation à La Défense, l’Association Forêt Vierge, organisatrice de sa « tournée 2019 », préfère le présenter à des hommes d’affaires, loin des journalistes, sous la houlette de l’industriel de l’hydroélectricité Robert Dardanne (Voltalia) et le leader de « droite souverainiste » Nicolas Dupont-Aignan (qui s’est empressé de répandre des photos sur les réseaux sociaux). Henri de Bontin, soutien du premier cercle du politicien rêvait de mettre sur pied cette rencontre depuis des années.
Ce choix assumé n’est pas étonnant, Dutilleux, qui fait voyager le chef Raoni en Europe pour la sixième fois (sur dix) n’est pas un militant et Bontin se plaignait bien en 2014 devant les chefs Raoni et Megaron que Planète Amazone leur avait fait perdre une grosse donation de EDF en raison d’une publication sur Facebook accompagnée d’une photo de Megaron pointant la tour EDF. De notre point de vue, Bontin reprochait à Planète Amazone d’avoir sauvé la réputation du chef amazonien en lui évitant de devenir la victime d’une opération de greenwashing.
En 2019 en tout cas, le chef Raoni, leader historique de la lutte contre le barrage de Belo Monte, n’aura pas été entendu sur les grands barrages, alors qu’il avait l’intention de l’être, comme il s’en était confié au journal Le Monde juste avant d’arriver en France. Lors de son récent passage à Genève, une radio suisse s’est étonnée de son mutisme quand elle a essayé de le faire réagir sur les intentions inquiétantes de Bolsonaro, mettant en péril l’Amazonie et ses peuples indigènes et communautés traditionnelles. De quoi se demander si l’Association Forêt Vierge, reproduisant sa stratégie désastreuse du voyage qu’elle organisa en 2011, n’a pas une nouvelle fois mis dans la balance qu’un discours trop offensif ferait fuir « les donateurs ». Tout dépend vers qui l’on se tourne et le niveau de sincérité desdits donateurs, n’est-ce pas ?
Portrait du baron Henri de Gislain de Bontin, l’homme des basses besognes du « Raoni Tour 2019 »
Sans Bontin, ce « Raoni Tour 2019 » (les organisateurs avaient sérieusement fait imprimer des badges d’accès à la manière des rock stars) ponctué de rendez-vous privés avec cabinet d’avocats et cercles d’affaires et de déjeuners et diners mondains avec la jet-set, n’aurait probablement pas eu lieu. Son apothéose à lui fut l’étape lyonnaise, dont il a été le chef d’orchestre et où, avec la bénédiction de Gérard Collomb, il a pu briller en société pendant deux jours, avec de très fortes retombées médiatiques à la clé. Mais derrière la magnifique opération de communication, se cachent près de cinq ans de sombres intrigues, loin des yeux et oreilles du grand public et donc des médias. Les éléments que nous rassemblons aujourd’hui démontrent que Bontin n’a pas hésité à manipuler une leader indigène menacée de mort soutenue par Planète Amazone et Nicolas Hulot (Valdelice Veron du peuple Guarani Kaiowa), le chef Raoni lui-même (grâce à des complicités parmi ses proches) et à s’associer à des actes illégaux pour permettre le retour en grâce de Jean-Pierre Dutilleux, soupçonné d’exploiter le chef amazonien depuis plus de 40 ans et désormais épaulé par des industriels et un spécialiste des crypto-monnaies pour ce « dernier voyage », dont les projets à financer sont pour le moins flous, bancals, sinon farfelus.
A qui avons-nous à faire ? Agé de 53 ans, le baron Henri de Gislain de Bontin est le cadet d’une fratrie de 4 enfants (3 frères et une sœur). La famille aristocratique, qui descendrait de Saint Louis, possède un château à 20 km à l’Ouest d’Auxerre, dans le village des Ormes, situé dans le canton d’Aillant-sur-Tholon. Henri rencontre Jean-Pierre Dutilleux en 2010, au moment où celui-ci se prépare à ramener le chef Raoni en Europe, neuf ans après leur dernier voyage et une longue brouille, marquée par une plainte du chef Raoni à l’encontre de Dutilleux pour des histoires de levée de fonds auprès d’autorités européennes.
En mai 2010, Bontin obtient un chèque de sa compagnie Aviva pour le chef Raoni à travers l’Association Forêt Vierge, qu’il vient de rejoindre, et ouvre la porte du palais princier de Monaco au célèbre défenseur de la forêt amazonienne et à Dutilleux. La connexion Monaco, Henri de Bontin la tient de son aîné, Jérôme de Bontin, citoyen américain (ayant voté Trump en 2016) ayant réussi dans la finance avant d’investir dans le football (il fut notamment président de l’AS Monaco de 2008 à 2009 après en avoir été administrateur depuis 2002) et surtout ami de jeunesse du prince Albert II de Monaco (il est le parrain de son fils).
Séduit par Dutilleux, Henri se montre peu regardant sur le projet proposé au Prince de Monaco par Dutilleux, en présence d’un chef Raoni mal traduit : il est demandé à Albert II de participer au montage d’un fonds pour « créer » un Institut Raoni, alors qu’un organisme portant ce nom et dont le président est le chef Raoni lui-même existe déjà depuis 2001 au Brésil… Le projet de création d’un fonds n’aboutira pas, mais l’opération de communication est réussie. La tournée 2010 fait escale au château de Bontin, ou Henri présente le chef à toute la famille. A peine le chef est-il reparti que Bontin veut développer un « parfum Raoni » par l’intermédiaire de Mékarfum, société nouvellement créée et dirigée par son frère ainé Bertil et sa belle-sœur Valérie. La marque « Raoni » est déposée à ce moment par l’AFV (malgré le refus du chef) avec le concours de Caroline de Bontin, sœur de Henri et Bertil, prétendument pour « protéger le nom de Raoni ». L’AFV a été relancée plusieurs fois pour restituer la marque au chef Raoni. Jusqu’à présent ces appels sont restés lettre morte.
2011, Bontin sert de caution à une campagne douteuse de l’AFV où celle-ci fait taire le chef Raoni sur le barrage
Quelques mois plus tard, Henri de Bontin sert de caution au voyage très controversé du cacique Raoni en France, organisé par l’Association Forêt Vierge en septembre 2011 (voir première partie), dont le but réel est de connecter le chef Raoni à un proche d’Henri Proglio, patron d’EDF, qui demande que silence soit fait sur le barrage de Belo Monte en échange de potentiels financements importants. A quoi pourra servir cet argent ? En tout cas pas à organiser un immense rassemblement d’opposition au barrage au Brésil, ni à réaliser la délimitation du territoire indigène de Kapot-Nhinore, comme le souhaite pourtant le chef Raoni. Dutilleux trompe son monde en affirmant qu’il suffit de 300 000 euros, somme fictive, pour borner Kapot-Nhinore, alors que le feu vert des autorités brésiliennes n’a pas été donné. Henri de Bontin conduit pourtant Dutilleux chez son ami Henri de Raincourt, alors Ministre délégué à la coopération sous la tutelle d’Alain Juppé. Une demande d’aide au financement est déposée. L’illusion est parfaite et dans un premier temps le chef Raoni n’y voit que du feu.
Bontin organise ensuite un diner de charité au restaurant le Galvacher pendant lequel est improvisée une vente aux enchères illégale et conditionne la remise d’un don modeste de son ami Charles-Antoine de Vibraye, avec lequel il aime pratiquer la chasse à courre, par un passage très médiatisé du chef au château de Cheverny, haut-lieu de la vénerie ayant servi de modèle à Hergé pour le château de Moulinsart. Pendant une rencontre publique organisée par le « Comité de soutien au chef Raoni » à Villejuif pour lui permettre de rencontrer les signataires de sa pétition, Bontin réclame de l’argent pour le bornage de Kapot-Nhinore. Une corbeille est vite remplie. On sait que l’argent n’a pas servi au bornage. On a déjà raconté la suite et comment le chef Raoni a ensuite rompu, en avril 2012, avec Dutilleux et ses amis, dont Henri de Bontin.
2014 – 2015, Bontin le faux repenti infiltre Planète Amazone
Désavouant publiquement Jean-Pierre Dutilleux, le cacique Raoni annonce en mars 2012 que son relai en Europe sera désormais Planète Amazone. C’est sans doute pour cela et parce que le fondateur de Planète Amazone, Gert-Peter Bruch, connait bien Dutilleux et fut pendant quelques mois vice-président adjoint de l’Association Forêt Vierge, que Henri de Bontin se lance dès ce moment dans une stratégie de dénigrement permanent et de harcèlement sur les réseaux sociaux, à travers la page facebook officielle de l’AFV ou son propre compte facebook. En 2013, il se rend avec Dutilleux dans la région du Xingu avec des caisses de médicaments financées grâce au soutien du Prince de Monaco. La visite surprise tourne court : le cacique Raoni refuse de les recevoir.
En juin 2014, cependant, Planète Amazone, lui organise un rendez-vous avec les chefs Raoni et Megaron, en visite en Europe. Grave erreur. Devant plusieurs témoins et alors qu’un enregistreur audio tourne, Bontin affirme que Dutilleux a été contacté par EDF et que le projet d’une donation pour le chef Raoni a été ruiné par une photo de Planète Amazone où Megaron pointe du doigt le siège du groupe à la Défense. A la demande des chefs, qui dénoncent violemment Dutilleux, Bontin écrit sur papier libre sa lettre de démission de son poste de vice-président de l’AFV. Revirement sincère ? Que nenni, il s’agit d’un stratagème pour se rapprocher de Planète Amazone et reprendre le contrôle du chef Raoni. L’opération va s’étaler sur plus de 4 ans.
Enregistrement audio d’une discussion entre Henri de Bontin et les chefs Raoni et Megaron, Paris, juin 2014 – Transcription de l’audio – Henri de Bontin (à Gert-Peter Bruch) : […] et la dernière chose qu’il [Jean-Pierre Dutilleux] dit, c’est que, comme on a politisé un peu (toi et moi, je suis autant responsable que toi) le dernier voyage de l’AFV, quand Raoni est venu, on a perdu 150 000 euros de dons. Gert-Peter Bruch (au Cacique Raoni, en portugais) : Ah, il dit que Jean-Pierre lui aurait dit qu’à cause du fait que vous avez parlé de Belo Monte, qui est un problème politique, il aurait perdu 150 000 euros de dons pour vous. Un mensonge de plus… Henri de Bontin : La seule chose que je sais à propos d’une perte de dons, et là vous êtes un peu responsables, je peux vous donner une explication… Lorsque vous êtes arrivés en France, tu as pris une photo que tu a mise sur Facebook, de Megaron en train de pointer EDF. Il se trouve que EDF nous a contacté. Gert commence à traduire aux caciques Henri de Bontin : Alors EDF a contacté Jean-Pierre, hein ? […] EDF a contacté Jean-Pierre, et EDF a dit « mais qu’est-ce que c’est que ces rigolos qu’on doit recevoir ? » Il paraît qu’ils étaient prêts à vous faire une donation… Gert-Peter Bruch : Non… Henri de Bontin : C’est ce que Jean-Pierre m’a dit. Et du coup c’est pour ça qu’ils ne vous ont pas reçus. Gert-Peter Bruch : C’est un mensonge, un mensonge… Hugues Pieto : Le cacique veut parler. Cacique Raoni : la dernière fois que je suis venu ici avec lui, Jean-Pierre m’a dit droit dans les yeux : « tu ne peux pas parler du barrage de Belo Monte, parce que si tu en parles, les donations ne pourront pas arriver ». Gert-Peter Bruch : C’est ce qu’il dit mot pour mot. Henri de Bontin : Jean-Pierre m’a tenu le même langage à ce sujet, je suis au courant. Cacique Raoni : Et pour cette raison précise, je ne veux plus entendre parler de lui. Henri de Bontin : D’accord, d’accord. |
Dans les mois qui suivent, à force de patience et de séduction, Bontin parvient à persuader Planète Amazone de son désir de s’engager à ses côtés, comme le chef Raoni le lui a demandé. La mise à l’épreuve de Planète Amazone, qui reste prudente à son égard, semble bien commencer. Bontin favorise un don de médicaments aux indigènes dépendant de l’Institut Raoni par l’intermédiaire de la Croix-Rouge monégasque et organise des rendez-vous avec l’agglomération du Grand Lyon dans la perspective d’une visite du chef Raoni dans la ville, dans la foulée de la COP21 (décembre 2015). La règle fixée par Planète Amazone est simple : du concret ! Planète Amazone n’emmènera le cacique Raoni à Lyon que si un partenariat lui profitant est signé en amont, afin qu’il ne soit pas instrumentalisé. Après des mois de discussions autour des dossiers envoyés par Planète Amazone, le Grand Lyon ne respecte pas ses engagements et aucun partenariat n’est signé. Quelques jours avant l’agenda fixé de longue date, on apprend que la visite du cacique Raoni doit se résumer à un parcours médiatique mettant en valeur Gérard Collomb, et à un dîner de gala organisé par Bontin, qui n’a pas fourni les garanties promises quant à la réalité des réservations. Bontin promet que la ville donnera quelques milliers d’euros en compensation de l’accord non respecté. Après vérification il n’en est rien. Le cacique Raoni, déjà épuisé par les nombreuses activités que lui organise Planète Amazone pendant la COP21 renonce, après présentation de la situation, à se rendre à Lyon.
L’agenda de Bontin est contrarié, il est fou de rage. Il passe vite à l’attaque. Mais Planète Amazone est déjà en alerte. D’une part, des indices prouvent que Bontin est toujours en lien avec Dutilleux et de l’autre, ce dernier tente de rencontrer le chef à Paris, pendant la COP21. Raoni refuse l’invitation faite par l’intermédiaire du directeur de l’Institut Raoni, qui, pour des raisons encore occultes, semble lui aussi œuvrer au rapprochement avec Dutilleux après l’avoir pourtant violemment dénoncé. Un troisième homme, le producteur et réalisateur Alexandre Bouchet, est parvenu à convaincre Planète Amazone après des mois d’approche qu’il a rompu tout lien avec Dutilleux et qu’il développe un film pour la Globo afin de dénoncer le barrage de Belo Monte. Il souhaite proposer au chef Raoni d’y participer. C’est à cet effet que Planète Amazone lui emmène deux fois le chef à domicile pendant la COP21. Quelques mois plus tard, en avril 2016, on retrouvera Alexandre Bouchet en Amazonie avec Dutilleux, où les deux hommes, qui ont déjà vendu le projet d’un film biographique du chef Raoni à Arte sans l’en avoir averti, abattront leurs cartes, parlant pour la première fois d’un projet de « nouveau tour du monde ». Bontin est bien entendu dans la boucle même s’il n’en laisse (presque) rien paraître. Sans le savoir, Planète Amazone est déjà prise dans une toile d’araignée tissée de longue date.
Piège et accusations mensongères autour d’une donation d’Humanis pour l’Alliance des Gardiens de Mère Nature
Le cacique Raoni est venu à la COP21 pour lancer avec Planète Amazone l’Alliance des Gardiens de Mère Nature et appeler dans la foulée à la tenue d’une Grande Assemblée réunissant au Brésil, des représentants indigènes du monde entier. L’opération nécessite de lever des fonds. Bontin en profite pour tendre un piège. Il obtient pour Planète Amazone 12 000 € de la compagnie d’assurance Humanis à condition que le chef Raoni et Planète Amazone effectuent une présentation au siège de l’entreprise, mais au lieu de les affecter au financement de la Grande Assemblée, il a convenu qu’ils servent à financer un diner de charité au Chalet des Iles, restaurant huppé du bois de Boulogne. Planète Amazone, reconnue d’intérêt général, refuse la demande de Bontin d’engager ses fonds (plus de 15 000 € tout de même) pour réserver le Chalet des Iles et le projet de diner de charité est rabattu sur un restaurant beaucoup plus modeste, où Bontin réunit 20 personnes sur les 200 promises. Il laisse bientôt entendre que la donation d’Humanis reçue par Planète Amazone pourrait être considérée comme un détournement de fonds si elle était affectée à l’Alliance, puisqu’elle n’a finalement pas servi à financer le dîner au Chalet des Îles. A son insu, la direction d’Humanis confirme que son don est bien en faveur d’un grand rassemblement au Brésil au profit de l’Alliance, puisque c’est ce qui a été présenté devant ses salariés. Bontin fera tout de même courir le bruit que Planète Amazone aurait gardé cet argent. Il demande quelque temps plus tard à Dutilleux de lui traduire un message en ce sens, afin qu’il l’envoie à certains indigènes du Brésil dans le but de ruiner la confiance qu’ils portent à Planète Amazone. Bontin ne sait alors pas que les fonds d’Humanis ont déjà été transmis à l’Institut Raoni, après la signature d’une convention.
Tout cela fait partie d’un plan plus vaste destiné à discréditer Planète Amazone et l’Alliance des Gardiens de Mère Nature. A cet escient, Bontin rameute par le biais des réseaux sociaux quelques détracteurs de Planète Amazone afin de les inciter à se constituer en collectif de plaignants. Parmi eux, un jeune preneur d’images qui a cherché à s’approprier des images tournées pour l’association. Planète Amazone le poursuit en diffamation depuis fin 2014 pour des accusations de détournement de fonds qu’on semble lui avoir soufflé à l’oreille (le garçon sera condamné en 2018). Selon une ancienne secrétaire de l’AFV, Dutilleux le recevra plusieurs fois à diner, ainsi que ceux qu’il a réussi à convaincre de témoigner en sa faveur, il lui « prêtera » même son avocat d’alors.
Instrumentalisation de Valdelice Veron du peuple Guarani Kaiowa, leader indigène menacée de mort
Ceci n’est que le prélude à des manipulations beaucoup plus graves, dont le but est de détruire la confiance que Planète Amazone a acquise auprès de nombreux partenaires et représentants indigènes. Petit retour en arrière. En juillet 2015, Planète Amazone a reçu le soutien de Nicolas Hulot pour faire venir en France Valdelice Veron, représentante du peuple indigène Guarani Kaiowa victime d’un effroyable génocide au Brésil. Menacée de mort, elle est parvenue à éviter les balles des fermiers voulant l’empêcher de lancer l’appel au secours de son peuple en Europe. Sa participation au Sommet des Consciences, où elle appelle à la reconnaissance du crime d’écocide et présente pour la première fois au public l’Alliance des Gardiens de Mère Nature, est saluée par les médias. Une plainte pour génocide est déposée à la Cour Pénale Internationale. Cette première visite est un succès.
Henri de Bontin gravite alors autour de Planète Amazone et fait connaissance avec Valdelice et son époux. Il s’incruste même dans un rendez-vous avec le Prince de Monaco auquel il n’est pas invité. Quelques mois plus tard, avec l’assentiment de Jean-Pierre Dutilleux, il effectue un travail de dénigrement auprès de Valdelice Veron, à laquelle il affirme que Planète Amazone est discréditée auprès du Prince de Monaco. Celui-ci, pour plaider la cause de son peuple auprès des plus hautes autorités brésiliennes au moment des Jeux Olympiques, aurait besoin d’un message écrit ou filmé prouvant que Valdelice Veron s’est détachée de l’association. Après maintes hésitations, Valdelice Veron, désespérée pour son peuple, finit par envoyer de petites vidéos enregistrées par son téléphone portable. Les textes sont lus d’une voix machinale. Valdelice supplie le prince de l’aider. On retrouve ensuite l’une des ritournelles de Bontin et Dutilleux : Planète Amazone et son président utiliseraient la cause et les indigènes pour leur propre intérêt. Valdelice Veron dit s’être détachée de Planète Amazone mais aussi de l’Institut Raoni, puis remercie Henri de Bontin, sa fille en bas âge, et la mère de celle-ci, qu’il lui a présentées en France. Cette maladresse signe la forfaiture. Le Prince de Monaco ne sera pas le seul à recevoir cette vidéo qu’il n’a jamais demandé. Ce sera aussi le cas, par exemple, de l’équipe du chef Raoni, qui se montrera furieuse de voir le nom de leur institution citée dans cette manipulation… Valdelice Veron, utilisée sans vergogne, ressortira de cette histoire fragilisée. Elle n’a plus voyagé hors de son pays depuis mais a renoué des liens avec Gert-Peter Bruch.
Manipulée par Henri de Bontin, la leader indigène Valdelice Veron se filme avec son téléphone. :
– Transcription de l’audio –Nous ne faisons pas partie de l’ong de ce Gert Bruch, Planète Amazone, ni de l’Institut Raoni, où il utilise les peuples indigènes pour son bénéfice propre. Prince Albert, nous voulons simplement survivre. Nous avons besoin de votre appui afin que cesse ce génocide du peuple Guarani-Kaiowa. La nation Guarani-Kaiowa saigne aujourd’hui. Henri, Alice et la petite Maria-Raoni, je vous remercie vous aussi de porter attention aux peuples indigènes de l’Etat du Mato Grosso do Sul. Nous avons besoin de votre aide. |
Tentative de destruction de l’Alliance des Gardiens de Mère Nature avec la complicité d’un kayapo pendant la campagne « Rejoignez les Gardiens de la terre »
En juin 2016, Planète Amazone lance, avec le soutien du cacique Raoni, de Pierre Richard, Bernard Lavilliers, Nicolas Hulot, Paul Watson… une campagne d’appel au financement participatif afin de financer la tenue, au Brésil, d’une Grande Assemblée de l’Alliance des Gardiens de Mère Nature.
Le 26 juillet, alors que la collecte de fonds « Rejoignez les Gardiens de la Terre » est déjà un succès avec plus de 170 000 € collectés une lettre sans en-tête datée du 25 juillet et signée du Cacique Raoni est diffusée sur les réseaux sociaux et sur les boîtes e-mails de médias et personnalités ciblés. Aux termes de cette lettre, prétendument adressée au Président de Planète Amazone, Gert-Peter Bruch (qui ne l’a jamais reçue directement), le chef Raoni fait part de sa volonté de rompre toute relation avec lui et son organisation en raison d’une « utilisation incorrecte de [son] nom ». Le soir du même jour l’Institut Raoni, publie sur sa page Facebook un « communiqué urgent » contresigné par son administrateur. Dans ce document le chef indique avoir été abusé le 25 juillet, sa signature ayant été obtenue par le biais d’un intermédiaire de son propre peuple, sans qu’il n’ait eu connaissance du contenu réel (il ne sait ni lire, ni écrire). Le cacique Raoni dénonce, à cette occasion, l’intervention malveillante de tiers dans cette opération.
Très vite, Planète Amazone demande des explications à l’Association pour la Forêt Vierge (AFV) et à M. Henri de Bontin, qui ont publié publiquement la lettre frauduleuse sur leur page Facebook. Bontin a aussi envoyé la lettre à des partenaires de Planète Amazone, des institutions, des médias… Des e-mails échangés entre eux révèlent très vite que le faux document est une fabrication de Messieurs Jean-Pierre Dutilleux et Henri de Bontin pour nuire au chef Raoni, à l’Alliance des Gardiens de Mère Nature et à l’Association Planète Amazone. Ces courriels prouvent que la personne ayant frauduleusement recueilli la signature du chef Raoni est Bemoro Metuktire, qui sera 3 ans plus tard, en mai 2019, le seul accompagnant kayapo du cacique Raoni lors de sa tournée en Europe et s’affichera avec lui sur toutes les photos prises auprès des personnalités rencontrées.
La déclaration frauduleuse a pour conséquence immédiate l’intervention de la fondation Nicolas Hulot qui, aux termes d’une lettre adressée au Président de Planète Amazone, exige des explications et envisage des poursuites judiciaires sur la base de ce document. Dès cet instant et malgré l’incident apparemment maitrisé (Dutilleux est dénoncé par le cacique Raoni une première fois par voie de communiqué en août 2016 et une seconde fois dans une vidéo en février 2017), l’écologiste s’éloigne de Planète Amazone et de l’Alliance des Gardiens de Mère Nature. Il ne sera pas le seul. Un préjudice certain. Malgré cet épisode éprouvant et après d’autres obstacles probablement liés, Planète Amazone est tout de même parvenu à organiser, à Brasilia en octobre 2017, la Grande Assemblée de l’Alliance. Celle-ci a rassemblé 200 représentants indigènes et écologistes venus de 30 pays et abouti à la Déclaration de l’Alliance des Gardiens et Enfants de la Terre Mère. C’est après sa tenue que Planète Amazone a porté plainte contre Dutilleux et Bontin pour faux et usage de faux. Le procès n’a pas encore eu lieu.
Septembre 2018, le réseau Dutilleux se dévoile enfin au moment de son retour fracassant auprès du chef Raoni
Après d’autres manipulations visant à discréditer définitivement Planète Amazone et l’Alliance des Gardiens de Mère Nature, favorisées par des conflits d’intérêts entre les partenaires de l’Institut Raoni (voir première partie de l’enquête), Gert-Peter Bruch est, en septembre 2018, dissuadé de se rendre au Brésil, où il s’apprêtait à retrouver le cacique Raoni, qui venait de solliciter son soutien. Des informations inquiétantes recueillies sur place, une trop forte insistance à le faire venir à une date donnée et un surprenant appel de Bontin sur le numéro privé de Pierre Richard donnent l’alerte. Le voyage est annulé après un Conseil du Comité Exécutif de l’Alliance des Gardiens de Mère Nature, dont Gert-Peter Bruch est membre. Quinze jours après la date où Gert-Peter Bruch avait prévu de retrouver le cacique Raoni au village de Metuktire, Dutilleux, guidé par Bemoro Metuktire, y débarque avec l’industriel Robert Dardanne, constructeur de barrages hydroélectriques et opérateur de crédits carbone. Deux ans plus tôt, les deux hommes qui attendaient le chef Raoni à la cérémonie funéraire du chef Pirakuman dans le Parc Indigène du Xingu flanqués de l’industriel Jacques Rocher (Fondation Yves Rocher) et de Stéphane Voisin (spécialiste des crypto monnaies) étaient repartis bredouilles. Le scandale de la lettre frauduleuse avait dissuadé le chef de s’y rendre.
Il n’avait donc passé aucun accord avec ces hommes d’affaires à l’intermédiaire douteux et pas participé au tournage du film qu’Alexandre Bouchet et Dutilleux avaient déjà vendu à Bonne Pioche pour une diffusion sur Arte. Le chef fera d’ailleurs intervenir un avocat français, maître Choukroun, qui dissuadera la compagnie de Bonne Pioche d’utiliser son nom et son image (« Raoni, une histoire amazonienne » est ainsi devenu « Une histoire amazonienne », diffusé sur Arte à l’été 2018). Mais en septembre 2018 tout est différent. Des contrats sont immédiatement signés : nouveau livre, nouveau film, tournée « mondiale », promesse de faire campagne pour démarquer le territoire de Kapot-Nhinore. Les conditions de ce revirement soudain et spectaculaire restent floues, même si le témoignage d’une personne présente fait planer de forts soupçons de corruption.
En janvier 2019 Planète Amazone et Gert-Peter Bruch sont assignés en référé au nom de Jean-Pierre Dutilleux et du cacique Raoni, par le cabinet d’avocats Simmons & Simmons, qui défend les intérêts de compagnies issues de l’industrie minière (dont NordGold, qui développe le projet Montagne d’Or en Guyane Française) et de celle des grands barrages (dont EDF). Est demandé le retrait d’internet de la vidéo dans laquelle Raoni et deux de ses proches dénoncent Jean-Pierre Dutilleux, notamment pour s’être introduit illégalement dans leur territoire. Le document produit par Dutilleux pour prouver que son entrée était autorisée, prétendument établi devant notaire, comporte deux signatures grossièrement imitées, celles du chef Raoni et d’un autre cacique. La seule signature authentique est celle du prétendu témoin, Bemoro Metuktire, encore lui. Le procureur de la République du Ministère Public Federal Felicio Pontes, qui a instruit la plupart des procès contre le barrage de Belo Monte, rencontre le cacique Raoni avant le délibéré et certifie que celui-ci n’est pas au courant de cette action en justice faite en son nom contre « mon ami Gert ». Jean-Pierre Dutilleux est débouté. Planète Amazone porte une nouvelle fois plainte contre lui, cette fois-ci pour fabrication et usage de fausse attestation dans une tentative d’escroquerie au jugement. La vidéo est toujours en ligne à ce jour.
L’heure des comptes
Dès l’arrivée à Paris du chef Raoni, le 13 mai 2019, Dutilleux et Bontin le filmaient « devant huissier » afin qu’il dénigre publiquement Planète Amazone (voir notre décryptage). Sur son compte YouTube, l’Association Forêt Vierge laissait sous-entendre que la vidéo avec été réalisée avec l’assistance du cabinet d’avocats Simmons & Simmons (la mention a été supprimée rapidement), qui comme nous l’avons rappelé, défend les intérêts de multinationales de l’industrie minière, des grands barrages et du pétrole. Ces mêmes corporations qui causent des ravages dans de nombreux territoires autochtones jusque là préservés à travers le monde. Simmons & Simmons eu la primeur de la tournée avec une conférence privée à la Maison de l’Amérique Latine. C’est l’endroit même où, il y a trente ans, Sting avait attiré des centaines de journalistes et curieux pour lancer sa tournée mondiale triomphale de 2 mois et 17 pays avec le chef Raoni et Jean-Pierre Dutilleux. Cette fois, c’était Robert Dardanne, co-fondateur de Voltalia et l’un des chefs d’orchestre de cette tournée en tant vice-présidents de l’Association Forêt Vierge, qui était assis au premier rang des spectateurs. La vigilance des organisateurs fait qu’il n’y avait ni média, ni curieux dans la salle. Replacé dans le contexte de nos révélations, cette anecdote devient l’un des symboles d’un combat sciemment perverti.
Finalement, à force de manipulations et grâce à l’assistance très appuyée de Henri de Bontin, de Bemoro Metuktire et le soutien particulier de Robert Dardanne, Jacques Rocher (Fondation Yves Rocher), Alexandre Bouchet et Patrick Mahé (ami de toujours de Dutilleux, ancien rédacteur en chef de Paris Match), Jean-Pierre Dutilleux est parvenu à faire de nouveau voyager le chef Raoni en Europe, avec les mêmes travers (traductions approximatives ou inexistantes, mise sous contrôle de la délégation indigène…).
Bontin a eu son diner de gala au Chalet des Iles (avec vente aux enchères légale ?), sa photo avec le chef et Dupont Aignan et son heure de gloire auprès du tout Lyon. Jubilant, Alexandre Bouchet, propulsé « caméraman officiel » du « Raoni Tour 2019 », a monté les marches du festival de Cannes avec Raoni aux côtés de sa femme, de Dutilleux et de Dardanne. Pas un mot sur l’Alliance, les barrages, les droits de la nature, l’écocide… Le nom même du territoire de Kapot-Nhinore, mission prioritaire du peuple kayapo, n’est pas apparu dans les médias. C’est ainsi que s’est achevée la tournée scandaleuse. Mais l’histoire est loin d’être finie. Pour l’instant l’image de Raoni, associée à celle de Macron ou du Pape, a fait l’effet d’un écran de fumée. L’avenir dira bien vite quelles seront les conséquences alors que celui-ci commence déjà à se dissiper.
Mme Mathilde Panot appelle l’attention de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur les conditions dans lesquelles a été organisée la tournée européenne du cacique Raoni Metuktire. Elle l’interroge sur les possibilités d’un abus de confiance de ce chef indigène à la renommée internationale et à l’âge avancé. Son neveu et successeur au Brésil, M. Megaron Txucaramãe, reçu avec lui à l’Assemblée nationale en juin 2014, s’est inquiété des conditions dans lesquelles l’organisateur de cette tournée, M. Jean-Pierre Dutilleux, l’a fait voyager. L’engagement formulé par écrit qu’il soit entouré de trois représentants de son peuple kayapo, dont l’un de ses deux traducteurs officiels et M. Megaron Txucaramãe n’a pas été satisfaite et seul M. Bemoro Metuktire l’a accompagné.
M. Jean-Pierre Dutilleux a déjà été accusé par le cacique Raoni de l’avoir isolé lors d’un précédent voyage européen, ainsi que d’avoir tenté de le convaincre de ne plus s’exprimer publiquement contre le barrage de Belo Monte en échange de promesses de dons devant permettre une sécurisation du territoire indigène de son peuple. Aujourd’hui, alors qu’il lève publiquement des fonds avec la promesse que ceux-ci permettront au cacique Raoni de sécuriser son territoire et celui des tribus avoisinantes, ce même M. Jean-Pierre Dutilleux a annoncé au journal Le Monde que cette nouvelle tournée doit aussi permettre de récolter 15 millions d’euros afin de créer un « Institut Xingu », alors que des institutions et organisations indigènes existent déjà pour défendre le peuple Kayapo et ceux de la région concernée par ce projet. Les fonds de ce projet pourraient être collectés auprès des différents gouvernements et sponsors que M. Dutilleux a pu rencontrer auprès du cacique Raoni pendant cette tournée. Plusieurs représentants kayapo proche du cacique Raoni ont déclaré que leur peuple n’avait pas eu connaissance de ce projet avant le jour de son départ, en conséquence, ils ont tenté sans succès de dissuader le cacique de partir dans ces conditions. Ce manquement constituerait une violation de la Convention 169 de l’OIT, ratifiée par le Brésil, qui garantit aux peuples autochtones le droit à une consultation préalable, libre et éclairée.
Elle lui demande donc s’il est au courant d’accords éventuels entre l’Association Forêt Vierge de M. Jean-Pierre Dutilleux, à travers laquelle il développe l’« Institut Xingu », et la République française, s’il connaît la structure juridique de l’Institut Xingu et la place qu’y tient le cacique Raoni, et lui fait part de ces inquiétudes sérieuses et légitimes quant à l’éventuelle manipulation du chef amazonien.